⏳ Pour les plus pressés
Airbnb a su rebondir rapidement cette année, alors que la pandémie de Covid-19 a affaibli le secteur de l’hôtellerie. L’action d’Airbnb est une bonne opportunité d’investissement long terme. Cependant, tant que la situation sanitaire n’est pas stabilisée, le cours pourrait être très volatil. Il est préférable d’attendre quelques semaines pour se positionner.
🏄 Airbnb surfe sur trois méga tendances
- L’attrait grandissant pour la liberté financière et la liberté géographique.
Liberté géographique : le télétravail, le freelancing, permettent à de plus en plus de personnes de travailler depuis n’importe où dans le monde. La tendance des « digital nomads », déjà présente avant 2020, a été accélérée cette année.
En effet, avec la pandémie de Covid-19, 2020 a été l’année du télétravail. De nombreux citadins ont alors choisi de se confiner ailleurs que chez eux, dans des locations Airbnb longue durée à la campagne.
Liberté financière : Airbnb permet à n’importe qui de gagner des revenus facilement et rapidement en louant son logement. Certains propriétaires ou locataires gagnent même leur vie grâce à Airbnb.
- Le changement de comportement des voyageurs : la recherche d’expériences authentiques.
- Le changement de priorité dans les dépenses des millenials, qui représentent la majorité des clients Airbnb (72% des utilisateurs de la plateforme ont moins de 44 ans). Ils préfèrent dépenser leur argent dans des expériences plutôt que dans des possessions matérielles.
📈 L’historique de l’action Airbnb
En avril, Airbnb a levé $2 milliards de dette, pour une valorisation de $18 milliards. Lors de sa dernière levée de fonds en 2017, Airbnb avait été valorisée $31 milliards.
Airbnb va entrer en bourse le 10 décembre 2020 pour une valorisation estimée à $47,3 milliards, soit un prix par action de $68.
Cette valorisation de $47,3 milliards est-elle justifiée ?
Prenons un ratio simple : le price-to-sales (P/S), qui se calcule en divisant la valorisation de l’entreprise par son chiffre d’affaires sur les 12 derniers mois. Le P/S de Booking est actuellement de 9,84. Celui de HomeAway lors de son rachat en 2015 par Expedia était d’environ 8, de même que celui de Onefinestay lors de son achat par Accor en 2016.
Si on applique le ratio de 8 à Airbnb, cela donne une valorisation d’environ $30 milliards avec le chiffre d’affaires 2018, et $38 milliards avec le chiffre d’affaires 2019. Si on applique le même ratio que Booking, soit 9,84, cela donne une valorisation de $36,4 milliards avec le chiffre d’affaires 2018, et $47,2 milliards avec le chiffre d’affaires 2019. Le prix d’introduction en bourse est donc dans la fourchette haute.
👎 Les haters disent …
« Si tu veux retrouver ton appartement saccagé, loue-le sur Airbnb. »
« Airbnb fait de la concurrence déloyale aux hôtels. La plateforme disparaîtra car les villes et les Etats prennent des règlementations anti-Airbnb. »
« Acheter une action du secteur tourisme en pleine pandémie ? Ce n’est pas le moment. »
👍 Les fans disent …
« Airbnb a réussi a faire des bénéfices au 3ème trimestre 2020, en pleine pandémie mondiale. »
« Airbnb a une marge de croissance élevée. Elle évalue son marché cible à $3,4 trillions. Elle n’a pas seulement bouleversé le marché du tourisme, elle l’a agrandi. »
« Airbnb n’a pas besoin de marketing pour grossir, ce qui est un avantage concurrentiel puissant. 91% de son trafic est organique. »
😍 Nous on dit …
Le succès en bourse d’Airbnb dépendra de la réponse du marché à 3 questions :
- Quelle était la situation de l’entreprise avant l’épidémie de Covid-19 ?
- Dans quelle mesure l’épidémie a impacté la croissance et la valeur de Airbnb ?
- Est-ce qu’Airbnb a la capacité de reprendre sa croissance d’avant crise ?
Nous sommes optimistes sur la valorisation d’Airbnb sur le long terme, pour plusieurs raisons que l’on détaillera dans cet article.
En revanche, il est possible que nous attendions pour acheter des actions, si le cours de l’action Airbnb monte en flèche dans les premiers jours ou semaines de cotation. Les actions technologiques et du secteur tourisme ont connu une forte volatilité cette année. Airbnb n’échappera certainement pas à cette tendance.
On n’exclut pas un scénario : que l’action Airbnb suive le même schéma que les actions Facebook ou Etsy, qui ont fortement chuté après leur IPO, pour exploser quelques mois voire quelques années plus tard.
A noter : dans le prospectus d’introduction en bourse S-1 d’Airbnb, il est écrit que l’entreprise s’attend à une forte baisse de chiffre d’affaires au 4ème trimestre. Début 2021, le marché pourra mal réagir lorsque les résultats tomberont.
🔎 Airbnb, c’est quoi ?
Airbnb a réussi ce qui semblait impossible : faire dormir des centaines de millions de voyageurs chez des inconnus.
Tout est parti d’un mail de Joe Gebbia à son colocataire Brian Chesky : “J’ai pensé à un moyen de gagner un peu d’argent.”.
Quand Joe Gebbia et Brian Chesky ont créé Airbnb en 2007, ils avaient un objectif simple : gagner de l’argent pour payer leur loyer, en proposant à des inconnus de loger chez eux plutôt que d’aller à l’hôtel. Aujourd’hui, alors que certains annonçaient sa fin, la valeur de Airbnb pour ses utilisateurs est encore plus renforcée :
- Côté hôtes : Airbnb permet à 4 millions d’hôtes de gagner un revenu complémentaire. Certains vivent même de Airbnb. Depuis sa création, Airbnb a permis à ses hôtes de gagner plus de 110 milliards au total. Chaque hôte gagne en moyenne $7 900 par an avec la plateforme.
- Côté voyageurs : les confinements, le télétravail, ont fait changer les comportements. Airbnb a su répondre aux nouveaux besoins : séjours longue durée et séjours à la campagne.
Airbnb est souvent comparée aux chaînes hôtelières, à notre avis, à tort. Un hôtelier est du côté de l’offre. Airbnb n’est ni du côté de l’offre, ni de la demande. Elle est un distributeur. Son activité est donc scalable : ajouter un bien en plus sur sa plateforme ne lui coûte (presque) rien. Ajouter une chambre d’hôtel à un hôtel est plus compliqué…
De plus, le fait que son offre est éclatée protège Airbnb des crises :
- Un hôtel peut être fermé ; cela a été le cas pendant les confinements cette année. Les logements Airbnb ne peuvent pas être « fermés ».
- La diversité des biens et des expériences proposées sur Airbnb lui permet de s’adapter à la demande des voyageurs : courts ou longs séjours, chambres ou villas entières, mer ou montagne, etc.
Enfin, Airbnb a une proposition de valeur unique, que les chaînes d’hôtels, et que même un autre distributeur comme Booking n’ont pas réussi à répliquer. Airbnb permet aux voyageurs de s’immerger dans la culture locale et de se sentir chez eux n’importe où dans le monde.
💰 Quel est le “revenue model” de Airbnb ?
Airbnb a une seule source de revenus : les frais de service. La majorité de ces frais est payée par le voyageur ; une petite partie est payée par l’hôte.
Une répartition des frais qui garantit la fidélité des hôtes
La répartition choisie par Airbnb est intelligente. L’hôte ne paye pas beaucoup de frais. Il est donc moins susceptible d’utiliser un concurrent d’Airbnb pour louer son bien, ou de proposer à un voyageur régulier de ne pas passer par la plateforme.
Une seule source de revenus, mais une diversification géographique du risque
Aucune ville ne représente plus de 1,5% du chiffre d’affaires.
Les 10 villes qui ont le plus de poids sont Londres, New York, Paris, Los Angeles, Rome, Barcelone, Tokyp, Toronto, San Diego et Lisbonne. Elles représentaient 12% du chiffre d’affaires d’Airbnb en 2019.
Une croissance du chiffre d’affaires élevée et une capacité à réduire les coûts rapidement
En 2017, le chiffre d’affaires de Airbnb a augmenté de 55% par rapport à 2016. En 2018, le chiffre d’affaires a encore augmenté de 43%, puis 32% en 2019.
Les dépenses de Airbnb sont élevées, mais la plupart d’entre elles proviennent des ventes et du marketing, du développement de produits et des employés. Cette année, Airbnb a pu réduire ses coûts d’environ $150 millions en seulement quelques semaines.
Un point négatif : Airbnb ne fait pas de bénéfices de façon régulière
Airbnb a jusqu’à présent privilégié sa croissance plutôt que ses profits. En 2019, son chiffre d’affaires s’élève à $4,8 milliards, soit une hausse de 29,7% par rapport à 2018. La perte pour l’année 2019 s’élève à $674 millions.
Néanmoins, elle a démontré sa capacité à générer des bénéfices sur certains trimestres.
Au 2ème trimestre 2020, le chiffre d’affaires d’Airbnb est en baisse de 72% par rapport au 2ème trimestre 2019, passant de $1,2 milliards à $334,8 millions. Pourtant, dès le 3ème trimestre 2020, les réservations ont repris, permettant à la plateforme de générer un bénéfice de $219 millions pour un chiffre d’affaires de $1,3 milliards.
😎 La marque Airbnb
Airbnb est tellement connue qu’elle est rentrée dans le language courant, comme Google : on « googlise », on cherche un « Airbnb »…
Cette année, Airbnb a divisé ses dépenses marketing par deux.
La force de sa marque lui a permis de maintenir son activité malgré tout : 91% du trafic sur sa plateforme est organique. Autrement dit, Airbnb ne dépend pas de la publicité Google, Facebook, ou autre, pour attirer de nouveaux hôtes ou voyageurs sur sa plateforme.
La notoriété de Airbnb lui permet de prendre une avance difficile à rattraper grâce à l’effet de réseau
Imaginez, vous voulez créer un concurrent de Airbnb. Comment vous commencez ?
Vous demandez à des propriétaires de mettre en ligne leur appartement sur votre site ? Ils n’ont aucun intérêt à le faire, car vous n’avez pas de voyageur intéressé pour louer. Face à vous, Airbnb : 50% des biens mis en ligne sur la plateforme mettent en moyenne seulement 4 jours pour avoir une première réservation.
Vous essayez d’attirer des voyageurs sur votre site ? Ils n’ont aucun intérêt à venir, car il n’y a pas beaucoup de choix d’appartements. Airbnb compte 5,6 millions de biens dans plus de 220 pays et régions, à travers plus de 100 000 villes.
Les plateformes comme Airbnb sont difficiles à créer, car elles se confrontent à un problème : l’effet de réseau. La définition de l’effet de réseau : plus il y a d’utilisateurs sur votre plateforme, plus les nouveaux utilisateurs ont un intérêt à s’inscrire.
Pour réussir à faire décoller une plateforme, il faut :
- Soit s’attaquer à une niche (par exemple, Airbnb a commencé avec des locations à San Francisco). Des concurrents de Airbnb se lancent sur des niches comme les maisons de luxe, le camping, etc. La difficulté est de grandir.
- Soit avoir un budget marketing énorme.
Airbnb a montré cette année qu’elle n’a pas besoin de marketing pour attirer des nouveaux utilisateurs sur sa plateforme. Le taux de rétention des hôtes dépasse 88% : ils sont fidèles à la plateforme.
Côté voyageurs, la fidélité à Airbnb se voit également dans les chiffres : 69% du chiffre d’affaires de 2019 a été généré par les utilisateurs existants.
Chaque nouveau voyageur est un hôte potentiel dans le futur : 23% des nouveaux hôtes étaient déjà inscrits sur la plateforme en tant que voyageur. Cela crée un cercle vertueux : les nouveaux voyageurs se transforment en hôtes, ce qui donne plus d’offre sur la plateforme, ce qui attire plus de voyageurs, etc.
Airbnb, une entreprise controversée
A l’évocation d’Airbnb, certains ont en tête l’image d’appartements saccagés, en mode Projet X. Il existe même un site internet, AirbnbHell, qui répertorie des témoignages de mauvaises expériences sur la plateforme. C’est un problème difficile à régler car tout le principe de la plateforme repose sur la confiance.
Airbnb, c’est aussi l’ennemi des hôteliers qui crient à la concurrence déloyale. Les villes s’en mêlent, en prenant des règlementations pour les limiter (taxes et limitation du nombre de nuitées sont leurs armes préférées).
Enfin, même si Airbnb a fait de nombreux propriétaires des rentiers qui vivent de leurs locations, la confiance des hôtes envers la plateforme a été écornée cette année. La décision d’Airbnb de rembourser les voyageurs en début d’année en raison de la pandémie leur a fait perdre beaucoup d’argent.
Les $9,2 milliards d’actions que l’entreprise prévoit de distribuer à ses hôtes américains ne suffiront peut-être pas à calmer les critiques.
🔮 Les prédictions sur l’avenir de Airbnb
Le chiffre d’affaires de Airbnb va reprendre rapidement son niveau d’avant pandémie
Que pourrait-il arriver de pire à une entreprise du secteur du tourisme qu’une pandémie mondiale, et des centaines de millions de personnes confinées chez elles ?
Les chaînes d’hôtels ont souffert et vont continuer à souffrir de cette crise, alors qu’Airbnb a montré la flexibilité de son modèle et a su rebondir dès cet été. Les réservations des 9 premiers mois de 2020 restent 32% inférieures à celles des 9 premiers mois de 2019. Mais Airbnb a réussi à multiplier son chiffre d’affaires par 4 au 3ème trimestre par rapport au 2ème trimestre, encaissant même un bénéfice de $219 millions.
Cela a été possible grâce aux mesures prises par les dirigeants : dès avril, Airbnb a licencié 25% de son personnel, réduit ses coûts marketing, lancé en deux semaines les Expériences en ligne.
La plateforme s’est également adaptée aux nouveaux comportements de ses utilisateurs : elle s’est mise à promouvoir des séjours proches de chez soi, des séjours à la campagne, et des séjours longue durée.
Airbnb a notamment ciblé les citadins en télétravail et les digital nomads à la recherche de calme pour travailler pendant les confinements.
Le cours de l’action Airbnb risque de faire des montagnes russes pendant longtemps
Nous voyons 3 raisons principales à cela :
- C’est eux qui ont estimé la taille de leur marché cible. Leurs chiffres restent à prouver.
- Même si leur estimation est bonne, à quelle vitesse vont-ils réussir à grossir ? Jusqu’à présent, la croissance d’Airbnb a eu un coût financier élevé. Si ils veulent continuer sur le même rythme, ils vont devoir encore sacrifier la profitabilité de l’entreprise, ce qui ne plaira pas au marché.
- Cette année, pour surmonter la crise, Airbnb a dû réduire ses coûts et se recentrer sur son coeur : sa communauté. Elle a donc choisi de stopper plusieurs projets : les hôtels Airbnb, l’offre Luxe, la production de documentaires, et plusieurs projets relatifs au transport.
Ces projets vont-ils reprendre, et si oui, quand ?
Ce sont des questions importantes car le cours d’action des entreprises cotées fluctue en fonction de la rapidité avec laquelle ces entreprises sont en mesure de produire des résultats.
0 commentaires